Une voix neuve pour le créole haïtien : « OU SE NANM TÈT MWEN », première offrande poétique de Kesner Jean-Yves Charles.

Dans un moment où Haïti cherche à renouer avec sa mémoire et son identité, une voix forte et sensible s’élève depuis le Sud-Est : celle de Kesner Jean-Yves Charles, sociologue de formation, homme de culture et digne fils de la ville de Jacmel. À l’approche de la Journée internationale de la langue et de la culture créoles, célébrée chaque 28 octobre, il annonce la parution prochaine de «OU SE NANM TÈT MWEN», prévue pour le 28 octobre 2025. Produit et édité par FOUYE RASIN NOU, ce recueil sera disponible sur toutes nos plateformes : site web, Facebook, X (Twitter) et TikTok.

Fouye Rasin Nou, le 24 octobre 2025_Ce recueil de dix poèmes vibrants est une véritable déclaration d’amour à la langue des ancêtres, forgée dans les plantations de Saint-Domingue, bâtie dans la douleur mais devenue, au fil du temps, symbole de dignité et de liberté. Pour Kesner, écrire en créole, c’est rappeler que cette langue est la mémoire vivante d’un peuple debout, une langue qui soigne, qui pense, qui rassemble.

L’auteur aime évoquer, avec la pudeur des gens du Sud-Est, son attachement à l’hôpital Saint-Michel de Jacmel, « l’endroit où tout a commencé », dit-il souvent. Né de Marie Jocelyne Jean-Baptiste et de feu Médeze Charles, plus connu sous le nom de Bòs Medèz, cordonnier renommé et figure respectée de la ville, Kesner grandit dans un environnement marqué par l’amour, la rigueur morale et une profonde connexion avec la nature. Son enfance se construit entre syllabaires déchirés, jeux de ruelle, chutes et apprentissages, jusqu’à cette sagesse qu’il découvre auprès des anciens, dans ces foyers populaires où la parole a encore un poids, où l’on apprend à écouter autant qu’à parler. C’est là que naît son amour du savoir et son chemin vers la Faculté des sciences humaines, où il a étudié la sociologie.

Bien avant de signer son propre recueil, Kesner œuvrait dans l’ombre. Il corrigeait les textes de particuliers, apportait une oreille fine aux manuscrits hésitants et partageait généreusement son sens du mot juste. Il s’investit aussi pleinement dans la scène musicale locale. Manager du groupe 45 Soldiers (FOFA), il a contribué à créer des concepts de morceaux, des titres de carnaval et des idées artistiques qui reflètent la culture populaire haïtienne dans toute sa splendeur.

Son écriture, nourrie par de nombreuses influences, puise à la fois dans la tendresse du vécu et dans l’urgence du témoignage. « Nou leve nan Feliks Morisseau, nou dekouvri Castera, nou tonbe nan Frankétienne, nou pase pran Bonel Auguste, Erl Jean-Pierre ak tout lòt ki te deside, libelibè, bay ekriti bèlte ak manm », dit-il, comme pour souligner l’importance de cette filiation littéraire. À l’instar de ses aînés, il considère l’acte d’écrire comme un acte de liberté et de transmission.

Ainsi, dans Ou se nanm tèt mwen, sa plume prend « lwa ». Elle devient danse, souffle et prière. Chaque poème explore un même thème : l’âme pensante, ce lieu intérieur où se croisent mémoire, résistance et beauté. Loin d’être un simple exercice lyrique, chaque mot y est chargé d’une responsabilité. Chaque vers est une offrande à la Lang Zansèt nou, une langue vivante, noble et lumineuse.

Interrogé sur le sens de cette première publication, l’auteur confie :

« Mwen ekri ak tout kè mwen sou sak ki pi enpòtan sou latè : Lanmou. Mwen pa vle sèlman fè bèl fraz, mwen vle bay bèlte nanm, mw vle montre ke kreyòl se yon lang rich, se lang limyè ak libète. Chak imaj kole ak kwayans nou, Kilti nou, anviwonnman nou ak tout lòt kado Lanati pataje ak peyi sa, ki fè richès li»

Ce recueil paraît à un moment charnière pour Haïti, alors que le pays oscille entre incertitude et volonté de renouveau. La voix de Kesner Jean-Yves Charles s’inscrit dans ce temps avec justesse. Elle ne crie pas, elle éclaire. Elle ne juge pas, elle rassemble. Elle ne se lamente pas, elle espère.

Le 28 octobre prochain, ce tambour de mots fera entendre sa cadence sur toutes les plateformes de FOUYE RASIN NOU. « OU SE NANM TÈT MWEN » n’est pas seulement une première œuvre, c’est un appel à se souvenir, à s’aimer, à se relever.

Et si, au-delà des mots, ce recueil ouvrait une porte que personne n’ose encore franchir ?
La réponse attendra… dans les vers de Kesner.

Jean-Pierre Styve / FOUYE RASIN NOU(FRN)

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